Le vitrail de la baie 26 de la cathédrale de Chartres est caractéristique de l’art du 14e siècle. C’est une grisaille et le décor diffère de celui de Stockbury (voir étape 3 : La peinture sur verre) par l’utilisation d’une « teinture »: le jaune d’argent. Ce produit complète la gamme des peintures traditionnelles (grisailles brunes ou noires) mais c’est un cément: il permet de « teinter » un verre en jaune, orangé ou ambre car il est composé de sels d’argent : chlorure, sulfure ou encore nitrate qui réagissent chimiquement avec les composants du verre (A). La « cémentation » se produit lorsque verres et sels d’argent sont recuits. La réaction nécessite de la chaleur et du temps (à partir de 580 °C).
L’intérêt des sels d’argent fut tout de suite compris, ils permettaient d’avoir deux couleurs transparentes sur une seul pièce de verre et ainsi d’économiser une coupe et un plomb d’assemblage. Beaucoup de figures devinrent ainsi blondes parce qu’il était facile et plaisant de « teinter » les cheveux en jaune (B). Il est intéressant de comparer l’ange de Chartres et celui de Coutances dont les cheveux ont été découpés dans un verre jaune et sertis (voir étape 3 : La peinture sur verre).
Comme il faut très peu de sels d’argent pour teinter un verre en jaune, on eut l’idée de les incorporer à de l’ocre. L’ocre qui donne son apparence aux jaunes d’argent avant cuisson, n’adhère pas pendant à celle-ci. Il facilite l’application des sels d’argent, permettant tous les dégradés et les enlevages nécessaires. Après cuisson, l’ocre est retiré et récupéré, laissant la teinte jaune apparaître (C).
Grâce au jaune d’argent, le répertoire des bordures sera facilement renouvelé pour s’adapter à la nouvelle esthétique de la Renaissance (D) et l’on verra apparaître et se développer un nouveau type de décor sur verre : le rondel peint qui permet d’animer une simple vitrerie (E). Après avoir été très répandu au 15e siècle, les jaunes d’argent seront encore employés au siècle suivant et à l’époque moderne. Parallèlement, le travail de modelé devient plus sophistiqué. Les modelés (F) sont traités par enlevage d’un lavis uniforme d’une grisaille plus fine que la grisaille à contour. Ce lavis est égalisé à l’aide d’un blaireau (G) ou égrainé avec un putois (H). Quant aux enlevages, ils sont faits à l’aide de brosses dures en soies de porc (I) et de pointes métalliques, de calame ou de plume (J).
Le cuivre et le fer fournissent aussi des céments. Sous la forme hématite, le fer donne une couleur de carnation très belle que l’on appelle « Jean Cousin » (K). Cette carnation fut employée abondamment au 16e siècle, puis concurrencée par d’autres couleurs à base de grisailles et d’émaux orangés.
Le cuivre est un colorant qui donne à la fois un vert émeraude, un bleu cyan et un rouge profond. La couleur dépend de la forme oxydée du métal. Sous la forme réduite, il peut être employé comme cément et donner une teinte rouge (L). Très rare par le passé, le cément rouge est aujourd’hui utilisé par de nombreux artistes.